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La perpétuité, ça dure combien en Egypte ?

dimanche 3 juin 2012 - 08h:26

Kharroubi Habib - Le Quotidien d’Oran

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En Egypte donc, on peut, comme, paraît-il, l’a fait un jour un détenu algérien, s’interroger pour savoir combien cela dure la perpétuité. Pour Moubarak en tout cas, pas trop longtemps très certainement.

L’ex-raïs égyptien Hosni Moubarak et son ancien ministre de l’Intérieur, tous deux accusés de corruption et d’implication dans la mort de plus de 800 manifestants en janvier-février, pendant la révolte qui les a renversés, ont été condamnés hier à la réclusion perpétuelle. En apparence, ils sont condamnés à passer le reste de leur vie en prison. Ce qui aurait dû satisfaire les proches des 800 victimes et tous les Egyptiens qui ont participé à la révolte anti-Moubarak. Il n’en est rien pourtant, car ils crient au procès tronqué et au triomphe de la contre-révolution.

Il est vrai que le tribunal a créé la surprise amère en ce montrant plus clément à l’égard de Moubarak et de son ancien ministre de l’Intérieur que le procureur à charge, qui a requis la peine de mort contre eux. Mais ce n’est pas tout : car il a encore acquitté purement et simplement les 6 principaux responsables de la sécurité et les fils Moubarak jugés dans le même procès. Les premiers, au motif que les témoignages et preuves dont le tribunal a eu connaissance n’étaient pas la réalité des accusations dont ils ont fait l’objet. Les seconds, à la raison qu’il y a prescription pour ce qui leur a été reproché.

Ceux qui ont manifesté hier leur indignation à l’annonce du verdict voient, non sans raison, dans sa clémence le désaveu de leur révolution et la porte ouverte à la réhabilitation insidieuse des personnes jugées. Pour eux, le jugement rendu l’a été par une justice aux ordres des forces travaillant à normaliser le pays en vidant les changements intervenus en Egypte de leur contenu révolutionnaire. Avec la libération annoncée des fils Moubarak, les partisans de celui-ci, encore puissants en Egypte, vont retrouver des porte-étendards autour desquels se regrouper et repartir à la conquête du pouvoir, lesquels auront toute latitude et bénéficieront de forts soutiens lorsqu’ils épauleront leur père pour son procès en appel.

L’armée a lâché Moubarak pour préserver l’essentiel, à savoir sa position prédominante au c ?ur du pouvoir égyptien. Elle a accepté qu’il soit jugé pour calmer la rue qui refusait la passation de pouvoir que lui a faite le raïs déchu. Mais elle a incontestablement pesé pour qu’il ne soit pas condamné à mort et pèsera encore en vue de son absolution. Elle compte le faire sans risquer de cristalliser contre elle le ressentiment populaire en profitant des inquiétudes que beaucoup d’Egyptiens éprouvent à la perspective d’une victoire à l’élection présidentielle du candidat des Frères musulmans. Inquiétudes qui peuvent en effet faire penser à cette frange de la population que « l’ennemi d’aujourd’hui est encore plus dangereux que celui d’hier » et qu’il est préférable donc d’avoir avec soi le second contre le premier. Quitte pour cela à fermer les yeux sur un éventuel jugement en appel encore plus clément pour Moubarak et son ancien ministre de l’Intérieur.

En Egypte donc, on peut, comme, paraît-il, l’a fait un jour un détenu algérien, s’interroger pour savoir combien cela dure la perpétuité. Pour Moubarak en tout cas, pas trop longtemps très certainement.

Oui, le verdict du Caire confirme l’essoufflement d’une révolution confisquée très tôt à cause de la naïveté angélique de ses acteurs. Et que l’on ne nous dise pas qu’elle a triomphé parce que le procès de Moubarak a pu avoir lieu.


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3 juin 2012 - Le Quotidien d’Oran - Analyse


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