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Élections présidentielles en Égypte : à défaut de les convaincre, essayez de les confondre...

mercredi 23 mai 2012 - 07h:21

Mohammad Khawly

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Alors que les acteurs majeurs dans la politique égyptienne, le Conseil suprême des Forces armées (SCAF) et les Frères musulmans, échangent des coups, le peuple égyptien reste dans un état de confusion, sans une véritable constitution ou une idée claire de ce qui s’en vient.

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Pour la première fois, le gagnant aux élections n’est pas connu à l’avance...

Les semaines de turbulences que l’Egypte vient d’endurer ne viennent pas de nulle part. Tout le monde a été en lice pour le contrôle de la révolution. Le Conseil suprême des Forces armées (SCAF) a essayé de la freiner, et les Frères musulmans ont utilisé les bouleversements politiques dans le sens de ses propres intérêts. Pendant ce temps, ce qu’il reste du régime de Moubarak tente de retrouver un pouvoir perdu, et le large soutien populaire de la révolution se transforme en hostilité.

En bref, l’Egypte a été bouleversée par la révolution. Les élections présidentielles ont été interrompues par une décision de justice, les avocats confirmant alors que la décision de justice ne signifiait pas que les élections seraient annulées mais qu’elles auraient lieu comme prévu.

Ahmed Shafik, le dernier Premier ministre sous Moubarak et chouchou du SCAF, a été exclu de la course puis autorisé à revenir dans la course, et maintenant personne ne sait s’il est encore dans la course ou non. Il a été disqualifié la première fois en raison de la loi d’isolement politique adoptée par le Parlement, visant à empêcher Omar Suleiman, l’ex-responsable des services de renseignements [doux euphémisme pour parler de flicage généralisé et de chambres de torture - NdT] de concourir à la présidence.

Cette exclusion, qui s’applique ainsi à Ahmed Shafik, a été levée après qu’il eut plaidé sa cause devant le comité des élections présidentielles. Le comité a demandé que la loi soit examinée par la haute cour constitutionnelle afin de déterminer sa constitutionnalité, mais la dernière décision refusant au comité des élections présidentielles le droit de remettre en question la constitutionnalité de la loi, a placé Shafik sous le risque d’être exclu une nouvelle fois.

La lutte entre le gouvernement et le parlement a été un autre signe de confusion. Les parlementaires menés par les Frères musulmans qui appelaient à la démission de Kamal Ganzouri et de son cabinet sont revenus les mains vides. En fin de compte, le différend a été résolu grâce à un remaniement limité du gouvernement et le remplacement de quatre ministres par le SCAF, permettant au cabinet de continuer à fonctionner.

Même la rédaction de la nouvelle constitution a eu sa part de controverses. Les mouvements politiques islamiques qui dominent le parlement ont cherché à contrôler la commission constitutionnelle. Après trois réunions de la commission, celle-ci a été invalidée par une décision de justice qui a souligné la nécessité que la commission soit formée à l’extérieur du parlement. C’était dans l’objectif d’assurer la représentation de l’ensemble du spectre politique égyptien et de ne pas permettre à un mouvement politique (c’est à dire aux islamistes) de monopoliser le processus constitutionnel.

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À proximité de la place Tahrir au centre du Caire le 16 mai 2012, un jeune égyptien passe devant un mur couvert de graffitis, représentant le conseil militaire au pouvoir contrôlant les élections présidentielles comme un spectacle de marionnettes - Photo : Reuters/Amr Abdallah Dalsh

La question demeure : comment l’Égypte a-t-elle pu en arriver à ce point ?

Le secrétaire général du Parti de l’alliance populaire et socialiste, Abdul Ghaffar Shukr, a essayé de résumer les raisons dans une conversation avec Al-Akhbar. Il a placé sur le SCAF la plus grande part du blâme, car sa gestion de la période de transition est la principale raison de la crise qui domine et de la vague de mécontentement qui a frappé les jeunes dans cette révolution.

Il cite également les actions de la Fraternité musulmane, qui a suivi ses propres objectifs tout en agissant comme si ses intérêts représentaient les meilleurs intérêts de l’Égypte, alors que beaucoup de ses préoccupations ne sont pas en phase avec celles du public égyptien et des autres organisations qui exigent la justice sociale et la stabilité grâce à la mise en ?uvre d’une constitution.

Abdul Ghaffar Shukr estime que la gestion transitoire du SCAF doit être terminée dès que possible par la tenue d’élections présidentielles, comme prévu, même s’il n’y a pas une constitution en place. Il déclare aussi qu’il est possible pour le futur président de faire usage de la constitution provisoire jusqu’à ce que la nouvelle constitution égyptienne soit rédigée.

Le chercheur au Centre Al-Ahram pour les études politiques et stratégiques, Emad Gad, explique de son côté que « la crise politique actuelle est la preuve d’un état de confusion, et que cette confusion vient de l’absence d’une constitution pour nous guider. » Il ajoute : « Si nous avions commencé par la formation du comité chargé de rédiger la constitution, aucune de ces turbulences que nous affrontons aujourd’hui n’aurait pu se produire. » Gad explique aussi que l’état actuel de l’Égypte est le résultat logique d’avoir suivi un chemin erroné dès le début de la période de transition.

Le mouvement islamiste a vu [la présentation d’une constitution provisoire] par le chancelier Tarek Bishri, à la tête de la commission constitutionnelle, comme « une victoire pour l’Islam », alors que le SCAF a estimé qu’elle était « un soutien pour lui-même. » À présent, ceux qui avaient un moment soutenu la constitution provisoire la critiquent, disant qu’il s’agit d’un « référendum sur la stabilité. » Au cours de la semaine écoulée, les membres du parlement, en particulier les partisans des Frères musulmans et les salafistes du parti al-Nour, ont attaqué l’article 28 de la constitution provisoire qui donne l’immunité à la commission électorale présidentielle et interdit la contestation de l’une de ses décisions. On en est arrivé au point où un groupe d’islamistes qui soutient le candidat disqualifié Hazem Salah Abou Ismaïl, a présenté des excuses publiques aux manifestants sur la place Tahrir, après que ce même groupe ait appuyé la constitution provisoire lors du référendum du 19 Mars.

Le chef du Parti social-démocrate de l’Égypte, Mohamed Abul-Ghar, déclare quant à lui que la propagande islamiste autour du référendum du 19 mars est ce qui a divisé le public égyptien. Il dit que les islamistes ont prôné le « oui » en disant que cela mènerait à la stabilité, hâterait la fin du régime militaire, et ferait bouger les choses à nouveau. Le fait que cela ne se soit pas produit jusqu’à présent a conduit à ce triste état de choses. Toutefois, le député Saad Aboud pense que tous ces problèmes viennent du fait que les élections se tiennent avant qu’il n’y ait une constitution solide : « ce qui est important maintenant est de savoir comment nous sortirons de cette crise, de corriger la situation, et mettre fin à cette état d’ambiguïté. » Aboud pense que l’adhésion aux décisions de la cour mènera à des de possibles solutions à ces crises politiques.

17 mai 2012 - Al-Akhbar - Vous pouvez consulter cet article à :
http://english.al-akhbar.com/conten...
Traduction : Info-Palestine.net - al-Mukhtar


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