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Bruits de vote en Israël

vendredi 4 mai 2012 - 09h:08

Aude Marcovitch - Libération

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Le Premier ministre, Benyamin Nétanyahou, devrait convoquer des législatives anticipées pour renforcer sa coalition en vue d’avoir les mains plus libres, notamment contre l’Iran.

Ce n’est pas quatre mais six ou sept ans que Benyamin Nétanyahou pourrait passer à la tête du gouvernement israélien. Profitant du succès populaire que lui accordent les sondages, le chef du Likoud va selon toute probabilité annoncer dans les prochains jours la tenue d’élections anticipées. Les commentateurs se disputent sur la date qui devrait être arrêtée, entre la mi-août et la mi-octobre, la prédiction la plus courue étant le 4 septembre.

Un an avant le terme de l’actuelle législature (qui doit prendre fin en octobre 2013), le Premier ministre ne manque pas de raisons pour appeler les électeurs aux urnes d’ici à l’automne. Jouissant d’une majorité confortable avec 78 députés sur les 120 membres de la Knesset (le Parlement israélien) en faveur de la coalition au pouvoir, le chef du Likoud n’est pourtant pas à l’abri des remous que pourraient provoquer deux prochains votes : celui sur la révision d’une loi qui permet aux ultraorthodoxes d’être exemptés du service militaire, et l’adoption du budget 2013, qui sera sans doute élagué de sommes importantes sur les dépenses sociales.

Gageure. C’est avec son partenaire dans la coalition, le ministre des Affaires étrangères, Avigdor Lieberman, leader du parti ultranationaliste et laïc Israël Beytenou, que Benyamin Nétanyahou doit composer concernant la révision de la loi sur le service militaire. Trouver un équilibre subtil entre les partis religieux, qui montent déjà au front pour fustiger la révision de leurs privilèges, et la population laïque tient de la gageure. En outre, les coupes dans le budget social pourraient à nouveau faire bouger la rue israélienne. L’été dernier, des centaines de milliers de personnes avaient manifesté pendant deux mois pour dénoncer la vie chère et la disparition de l’Etat social.

C’est aussi face à l’étranger que le chef du Likoud veut renforcer de quelques crans la stabilité de son gouvernement. Si les électeurs américains reconduisent en novembre le président Barack Obama, Benyamin Nétanyahou a tout intérêt à lui opposer une coalition solide dans leurs échanges, qui ne manqueront pas d’être encore conflictuels. Les deux hommes, dont les rapports comptent parmi les plus froids de l’histoire des relations israélo-américaines, divergent aussi bien sur le conflit avec les Palestiniens que sur la menace iranienne. Nétanyahou est partisan de la manière forte contre le programme nucléaire iranien et ne rate pas une occasion d’évoquer cette menace comme vitale pour Israël. Washington continue à privilégier le renforcement des sanctions plutôt qu’une opération militaire. Si un républicain était élu à la tête des Etats-Unis, le chef du gouvernement israélien verrait sa marge d’action pour mener des frappes préventives contre les installations nucléaires iraniennes sensiblement élargie. Il aurait dès lors besoin de tout le soutien politique possible à la Knesset pour convaincre sa population de la légitimité d’une telle action.

Face à une opposition anémique, une situation sécuritaire intérieure généralement bonne et une opinion ne croyant plus à un accord prochain avec les Palestiniens, Benyamin Nétanyahou peut envisager le résultat de législatives anticipées avec confiance. Selon les derniers sondages, le Likoud serait crédité d’environ 30 sièges, contre 27 aujourd’hui. Il pourrait sans doute s’appuyer sur une large coalition incluant aussi bien le parti centriste Kadima, en chute dans les sondages (qui pourrait ne conserver que 11 sièges sur 28) et mené désormais par Shaul Mofaz après la défaite de Tzipi Livni aux primaires de la formation, le Parti travailliste de Shelly Yachimovich (18 sièges contre 8), que la nouvelle formation centriste et laïque, Yesh Atid (« il y a un avenir », 11 sièges), dirigée par le journaliste Yaïr Lapid. Benyamin Nétanyahou se retrouverait alors en position de force pour imposer ses conditions au maintien d’Avigdor Lieberman et d’Israël Beytenou (13 sièges contre 15) et des petites formations religieuses dans la coalition. Le ministre de la Défense et ex-chef des travaillistes, Ehud Barak, l’autre homme fort du gouvernement, pourrait rejoindre la liste du Likoud.

« Déloyaux ». Mais l’opinion du plus grand nombre tranche avec les avis très sévères des anciens responsables des agences de sécurité et de l’armée sur la gestion des affaires par Nétanyahou et Ehud Barak, spécialement sur la question iranienne. Dernièrement, Yuval Diskin, chef du Shin Beth, le renseignement intérieur, entre 2005 et 2011, a déclaré qu’il ne « ferait pas confiance » aux deux hommes pour diriger le pays en cas de conflit avec l’Iran. Pis, il les a jugés « déloyaux envers le public » et a estimé que des frappes préventives contre les installations iraniennes pourraient précipiter et légitimer l’Iran à disposer de la bombe. Des remarques qui font suite à des critiques similaires de la part de l’ex-chef des services secrets (Mossad), Meïr Dagan, et de l’ex-chef d’état-major de l’armée, Gaby Ashkenazi. Pour l’analyste politique Ben Caspit, le fait que les principaux responsables de la sécurité, « des hommes avec des valeurs, pas des politiciens ni des "gauchistes", qui ne sont pas animés par des agendas personnels, disent la même chose, devrait tenir éveillé la nuit n’importe quel citoyen intelligent ».

Tel Aviv, le 2 mai 20121 - Libération


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