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Palestine : la réconciliation peut attendre

mardi 24 janvier 2012 - 02h:26

Saleh Al-Naami

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Un mémo explosif divulgué à la presse semble montrer que le Fatah mène le Hamas en bateau sur la réconciliation, écrit Saleh Al-Naami.

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Les flics d’Abbas, formés et entraînés par les Etats-Unis et Israël, sont ici en plein action contre des manifestants dans Ramallah

Quiconque suit les forums en ligne des jeunes militants du Fatah et du Hamas serait choqué par les attaques qui sont lancées de part et d’autre, un reflet de combien les relations se sont détériorées entre les partisans de chacune des organisations. Ismail Haniyeh condamne les agences de sécurité du Fatah tandis que la présidence palestinienne condamne le blocage d’une délégation du Fatah à l’entrée de Gaza il y a deux semaines. Les choses sont tellement enchevêtrées que plus personne ne se souvient des déclarations si optimistes du président de l’Autorité Palestinienne [AP] Mahmoud Abbas et du Secrétaire général du bureau politique du Hamas, Khaled Mechaal, après leur dernière réunion au Caire.

Sakhr Bassiso, membre du Comité central du Fatah qui faisait partie de la délégation du Fatah qui a voulu entrer dans Gaza, a déclaré que des agents de sécurité à l’entrée de Gaza ont demandé à la délégation d’attendre à la frontière au nord de Gaza avant de leur autoriser le passage. Les membres de la délégation ont refusé d’attendre et sont partis. « Ce qui s’est passé prouve que les dirigeants du Hamas ne sont pas intéressés par la réconciliation », a affirmé Bassiso. « Ils devraient être soumis à la justice pour avoir pris le contrôle de la bande de Gaza, sans aucun droit légitime. »

Pour sa part, un des responsables du Hamas, Salah al-Bardawil, a déclaré que les agents de sécurité à la frontière n’ont fait qu’appliquer une procédure de routine, en expliquant que demander à la délégation d’attendre « un court instant avait pour but de permettre de coordonner leur entrée officielle avec le fait d’assurer leur sécurité, et non pas de les insulter ». Al-Bardawil a ajouté : « Il est regrettable que les dirigeants du Fatah, qui n’hésitent pas à se coordonner avec les autorités d’occupation quand ils se déplacent à l’intérieur de la Cisjordanie, soient si sensibles à l’égard d’une mesure de sécurité de routine qui vise à assurer leur tranquillité en entrant dans la bande de Gaza ».

De nombreuses tentatives pour atténuer les dernières tensions se sont avérées infructueuses. Jamal Mohaysen, un membre du Comité central du Fatah, a déclaré que des contacts ont actuellement lieu entre la direction du Fatah et la direction du Hamas à Damas afin de surmonter la crise entre les deux groupes. « Nous sommes en contact avec les dirigeants du Hamas à Damas », a déclaré Mohaysen. « Ce sont eux les responsables de la signature de l’accord de réconciliation et non pas le groupe qui dirige dans la bande de Gaza. Nous nous sommes engagés à travailler à surmonter tous les obstacles et nous cherchons sincèrement à coopérer avec toutes les organisations palestiniennes à Gaza et en Cisjordanie pour mettre en ?uvre l’accord de réconciliation. » Mohaysen a exhorté toutes les organisations à appliquer l’accord du Caire et à « ne pas chercher des obstacles qui entravent la réconciliation et entretiennent les divisions entre la Cisjordanie et Gaza ».

Mais peu après que l’incident à la frontière se soit un peu calmé, une autre crise a éclaté qui a aggravé la méfiance entre les deux camps. Le Premier ministre du gouvernement de Gaza, Ismaïl Haniyeh, a directement accusé la direction de l’AP à Ramallah d’avoir tenté d’empêcher les dirigeants arabes de le rencontrer lors d’une récente tournée en Egypte, au Soudan, en Turquie et en Tunisie. Haniyeh a affirmé lors d’une séance du parlement palestinien en présence de représentants du Hamas de Gaza le 12 janvier, que les dirigeants de ces pays avaient ignoré ces tentatives.

« J’ai été informé par la présidence tunisienne que M. Abbas avait adressé un message pour qu’on évite de me rencontrer, mais le président tunisien a répondu que la Tunisie est un Etat de droit et qu’il me reçoit en tant que Premier ministre légitime, conformément à la loi palestinienne, jusqu’à ce qu’un nouveau premier ministre soit désigné », a déclaré Haniyeh. « Nous n’avions pas à porter cette question dans les médias et nous avons informé les Tunisiens qu’ils devaient être patients avec les effets des complications générées par la scène politique palestinienne ».

Il s’est aussi dit déçu que les efforts visant à réaliser la réconciliation palestinienne aient succombé à « la pression étrangère et aux interférences israéliennes » affirmant que cette pression a ralenti la mise en ?uvre de l’accord de réconciliation. « Il y avait volonté de poursuivre sur la voie de la réconciliation, pour guérir les blessures et rester unis face à l’occupation », a déclaré Haniyeh. « Mais malheureusement, l’intervention israélienne et internationale conserve un effet négatif. »

Il a également souligné l’un des principaux enjeux du conflit entre le Fatah et le Hamas, à savoir le transfert de 32 millions de dollars par la Ligue arabe sur la trésorerie du gouvernement à Ramallah et destinés à la reconstruction de Gaza. Haniyeh a affirmé qu’il n’existe pas d’accord entre le Hamas et l’Autorité palestinienne pour le transfert des fonds de reconstruction à travers le gouvernement de Ramallah, contredisant ainsi les déclarations d’Azzam Al-Ahmed, membre du Comité central du Fatah, qu’un tel accord existe.

Haniyeh a abordé un autre sujet sensible entre les deux groupes concernant l’avenir des agences de sécurité en Cisjordanie et à Gaza, et il a demandé « un soutien arabe pour restructurer les forces de sécurité palestiniennes sans la coopération de l’occupant israélien ».

Peu après le discours de Haniyeh, des médias palestiniens publié un mémo écrit par Adnan Al-Damiri, le responsable des forces de sécurité de Ramallah, la déclaration suivante : « La réconciliation palestinienne est uniquement un outil pour faire pression sur l’occupation afin d’atteindre nos objectifs dans les négociations, » et ne doit donc pas servir à véritablement parvenir à la réconciliation avec le Hamas. Dans la même note, Al-Damiri déclare que le Fatah « ne sera pas compromis en quoi que ce soit avec le Hamas lors de l’application de l’accord de réconciliation ». Il a en outre « rassuré » les agences de sécurité en Cisjordanie en disant : « Ni les élections présidentielles , ni les législatives n’auront lieu, et le corps législatif ne sera pas remis en place ».

Le mémo, publié sur des sites web palestiniens indépendants, a embarrassé la direction du Fatah et selon le Hamas a apporté la preuve que l’AP n’est pas sérieuse au sujet de la réconciliation. Ironiquement et malgré les tensions, les deux comités de réconciliation formés après la dernière réunion au Caire ont résolu certains des différends à l’origine des divisions internes. Il a été annoncé à Gaza et à Ramallah que le gouvernement de Salam Fayyad va délivrer des passeports à des milliers de personnes dans la bande de Gaza, alors que gouvernement de Fayyad avait auparavant empêché ces gens d’acquérir un passeport en raison de leur appartenance au Hamas.

Mustafa Al-Barghouti, membre du Comité des Libertés mis en place au cours des pourparlers du Caire, a déclaré qu’il y avait à présent un accord pour permettre la distribution de journaux et publications proches du Fatah à Gaza et proches du Hamas en Cisjordanie. Al-Barghouti a ajouté qu’il y avait un progrès sur la liberté de mouvement et de retour à la bande de Gaza, en particulier pour les dirigeants et les militants du Fatah qui ont fui Gaza après que le Hamas en ait pris le contrôle en juillet 2007. Il espérait que les parties allaient parvenir à un accord pour mettre fin au grave problème des agences de sécurité à Ramallah et à Gaza et de la poursuite respectivement de militants du Fatah et du Hamas, en ajoutant que des progrès avaient été accomplis sur la question.

Khaled Al-Batsh, une figure de proue du Jihad islamique et un collègue d’Al-Barghouti dans le Comité des Libertés à Gaza, a déclaré qu’Ismaïl Haniyeh avait fait remettre les clés de la maison d’Abbas dans le sud du district d’Al-Rimal pour les représentants du Fatah. Le Premier ministre a également émis un décret visant à rouvrir le siège du Comité central électoral à Gaza.

La possibilité d’afficher des progrès dans la mise en ?uvre de l’accord de réconciliation ne calme cependant pas les tensions entre les deux parties et qui ont été amplifiées par la décision d’Abbas de poursuivre des négociations « exploratoires » avec Israël à Amman sous les auspices du roi de Jordanie. La décision d’Abbas a été critiquée par toutes les organisations palestiniennes qui ont dit que cette décision aurait très certainement un impact négatif sur les chances de réussite d’une réconciliation.

Kayed Al-Ghoul, un membre du Front Populaire pour la Libération de la Palestine [FPLP], estime que la reprise des négociations est une « erreur » non seulement parce qu’Israël n’a pas pris la moindre mesure pour parvenir à une relance des pourparlers, mais surtout parce que celui-ci vise un impact négatif sur la réconciliation.

Tous les partis palestiniens comptent sur le rôle de l’Egypte et une source palestinienne bien informée a déclaré que l’équipe égyptienne qui doit superviser l’accord de réconciliation allait bientôt arriver à Gaza et à Ramallah pour une série de réunions. Il s’agit d’une tentative pour éviter un blocage sur les questions de la réconciliation et aboutir avant la fin du mois.

Malgré les progrès réalisés par certains groupes de travail et les efforts déployés par l’Egypte pour consolider la réconciliation palestinienne, tous les signes indiquent que l’accord signé par les deux parties pour tenir des élections législatives et présidentielles et former un nouveau gouvernement - deux questions majeures qui indiqueraient que les divisions internes sont résolues - a peu de chance d’être totalement appliqué à court terme.

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19 janvier 2012 - Al Ahram Weekly - Vous pouvez consulter cet article à :
http://weekly.ahram.org.eg/2012/108...
Traduction - Info-Palestine.net


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