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Des virus informatiques en lieu et place de missiles

mardi 17 janvier 2012 - 18h:43

Saleh -al-Naami -Al Ahram

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La perspective d’une guerre cybernétique contre Israël gagne du terrain et devient un très fort sujet de préoccupation parmi les responsables de la sécurité et de la stratégie de Tel Aviv, écrit Saleh Al-Naami.

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Les sites Web de la compagnie israélienne El Al et du Stock Exchange de Tel Aviv (TASE) ont tous deux été récemment déconnectés, quelques heures après avoir été prévenu par un pirate saoudien - Photo : AFP - Jack Guez

La semaine dernière, la hotline de la Banque centrale d’Israël a été inondée par une avalanche d’appels téléphoniques venus de dizaines de milliers d’Israéliens qui ont paniqué après avoir appris que leurs informations de carte de crédit avaient été piratées par quelqu’un qui a prétendu être un citoyen saoudien vivant au Mexique. Les valeurs sur les comptes bancaires concernés sont estimées à des centaines de millions de dollars, ce qui en fait un scénario cauchemardesque pour beaucoup d’Israéliens à l’intérieur et à l’extérieur du pays.

Mais les dirigeants en Israël n’étaient pas tant préoccupés par le fait que ces citoyens pouvaient perdre leur épargne, mais plutôt par la possibilité que ce piratage fasse partie d’une cyber-guerre lancée par un parti hostile visant à causer un dommage maximal à la sécurité nationale israélienne. Les responsables israéliens ont réfuté les allégations que ce n’était qu’un « hacker saoudien », et ont affirmé qu’il y avait des raisons de soupçonner que l’Iran soit à la source de l’attaque.

Ben Kasbet, analyste au journal Maariv, a repris des sources militaires israéliennes disant que l’Iran a un intérêt évident à lancer une guerre stratégique et cybernétique contre Israël en réponse aux cyber-attaques dont il récemment été l’objet et dont il a fait porter la responsabilité à Israël, en particulier le ver nommé Stuxnet qui a paralysé le système de centrifugeuse pour enrichir l’uranium utilisé dans les installations nucléaires iraniennes. Il y a également eu plusieurs attaques contre les silos de missiles à travers l’Iran. « Israël a choisi de lancer des attaques cybernétiques contre l’Iran », a écrit Kasbet, « et maintenant il doit faire face au même type de guerre. Il ne peut en blâmer que lui-même ».

Toutes les agences de sécurité nationale d’Israël conviennent que la cyber-guerre est à prendre au sérieux. Le ministre israélien de la Défense intérieure, Matan Vilnai, a déclaré que depuis que les institutions civiles et militaires en Israël utilisaient une technologie très avancée, ces systèmes sont plus sensibles que jamais au piratage venant de centres hostiles.

Shamuel Mentsur, le directeur d’une compagnie de sécurité cybernétique en Israël, a déclaré que toute guerre numérique contre Israël pourrait complètement paralyser l’infrastructure du pays, comme les aéroports, la production dans les secteurs économiques ainsi que les institutions privées. Mentsur a aussi expliqué que ceux qui sont hostiles pourraient utiliser ces technologies pour pénétrer les réseaux de communication publics et militaires, non seulement pour acquérir des informations sensibles et critiques secrètes, mais aussi pour transmettre de fausses informations auprès des dirigeants en Israël, ce qui pourrait alors entraîner de graves préjudices.

Amos Yadlin, l’ancien chef du renseignement militaire, a déclaré que l’armée israélienne a déjà créé une unité militaire pour la guerre électronique. Maariv a repris les propos de Yadlin : « La guerre électronique est basée sur trois principes : Collecter des renseignements, lancer des attaques et fournir une protection ». Dans le cadre de cette politique, une nouvelle direction a été choisie spécialement pour la guerre électronique et pour diriger ce qui est connu comme l’unité 8200, une unité d’écoute électronique dans le renseignement militaire israélien.

La nouvelle division est dirigée par un brigadier-général et elle comprend des experts en électronique spatiale et des officiers du renseignement. Elle est spécialisée dans la protection des réseaux des institutions sensibles, militaires et civils, telles que la Compagnie d’Electricité d’Israël, les aéroports et autres sites critiques. Elle lance également des attaques numériques rapides contre les centres hostiles. L’armée israélienne a pris d’autres mesures en annonçant son intention de recruter 300 hackers [pirates informatiques] israéliens, pour les affecter à la lutte contre les attaques qui pourraient être lancées contre des cibles militaires vitales.

Le chef d’état-major, Beni Ganz, a demandé la révision du plan quinquennal qui a été récemment approuvé par les militaires afin d’allouer plusieurs millions de dollars à la protection des systèmes sensibles de l’armée. En attendant, l’armée a ouvert cette semaine et pour la première fois une académie pour ce qu’elle présente comme des « combattants cybernétiques » dont la tâche sera de protéger les systèmes informatiques de l’armée contre les attaques de virus.

Une question clé est pourquoi Israël considère l’Iran comme le principal suspect dans le lancement de la guerre électronique contre Tel-Aviv, et pourquoi il s’interroge pour savoir si Téhéran a les capacités nécessaires pour poursuivre de telles attaques stratégiques. Alex Fishman, un commentateur militaire de haut rang dans le journal Yediot Aharonot, estime que l’expérience a montré que les Iraniens ont la capacité de mener des cyber-attaques nuisibles, ce qui explique pourquoi il prend une position plus ferme en pointant le doigt sur l’Iran. « Si l’Iran a récemment été en mesure de prendre le contrôle de l’un des avions furtifs américains les plus puissants et coûteux sans pilote utilisant une technologie avancée, alors il n’est pas impossible que des Iraniens piratent la base de données de cartes de crédit de plusieurs dizaines de milliers d’Israéliens », a déclaré Fishman.

Il a ajouté que l’Iran a tout un tableau de chasse en cyber-guerre et a été en mesure de réaliser « l’incroyable » exploit de faire planter le poste principal de commandes et de contrôle des drones américains sans pilote en Irak, alors que le siège de l’unité qui les contrôlent est situé sur une base militaire à l’intérieur les Etats-Unis. Fishman a ajouté que bien que les Etats-Unis disposent de 14 000 experts en cyber-guerre et aient investi des milliards de dollars pour protéger leurs réseaux informatiques, ils ont été incapables de se protéger des attaques iraniennes.

Fishman est persuadé qu’il y a des raisons de croire que l’Iran est capable d’aller à la pêche dans les systèmes militaires à travers le monde. Il a ajouté qu’à la fin des années 1980, les Iraniens ont réussi à déchiffrer les codes des avions de surveillance israéliens pour le sud du Liban, et avaient transmis aux combattants du Hezbollah les informations nécessaires pour aider à surveiller les mouvements des unités spéciales israéliennes opérant au Sud-Liban alors occupé par Israël. Il en est résulté l’organisation d’un piège dans lequel est tombé un groupe de l’unité spéciale 13 des forces de la marine israélienne. Treize soldats israéliens ont été abattus et beaucoup d’autres ont été blessés.

En août, DigiNotar, une société spécialisée dans la sécurité en ligne en Israël, s’est déclarée en faillite après que les Iraniens aient piraté les sites Internet de deux agences de renseignement israéliennes, le Mossad et le Shin Bet, ainsi que le site renommé d’informations Walla. Des sources militaires israéliennes ont prévenu que toute guerre contre Israël inclurait des cyber-attaques, et que les capacités techniques supérieures de l’armée israélienne - en comparaison avec d’autres armées dans la région - représentaient également un point de faiblesse critique.

Yediot Aharonot cite des sources comme expliquant que la technologie de pointe qui permet de renforcer la coordination entre les différentes branches de l’armée peut s’avérer être le talon d’Achille de l’armée israélienne, car cette technologie avancée donne à « l’ennemi » l’opportunité d’infiltrer et de paralyser la structure militaire qui dirige la machine de guerre israélienne, ou de la manipuler de façon à ce qu’elle cible Israël.

L’incident d’un piratage étendu dans une base de données de cartes de crédit a tiré la sonnette d’alarme chez les Israéliens. La Knesset a prévu de tenir une session d’urgence pour discuter des moyens de faire face à la « cyber guerre », tandis que le ministre adjoint des Affaires étrangères, Danny Ayalon, a averti que les intrusion cybernétiques contre la souveraineté d’Israël auraient des conséquences. Lors d’un séminaire récent à Beersheba, Ayalon a déclaré que les dernières cyber-attaques donnaient à Israël des raisons de suivre l’exemple des Etats-Unis qui ont déclaré que toute attaque sur son cyberespace est apparenté à une déclaration de guerre, et qu’ils allaient répliquer au besoin en lançant des missiles réels.

Après qu’Israël ait réussi à planter le système de centrifugeuses de l’Iran en utilisant un virus cybernétique, un officier israélien s’est vanté : « Au lieu de la Force aérienne, nous pouvons utiliser le cyberespace ; au lieu de missiles, nous pouvons utiliser des virus ». Il semble bien qu’en réponse, Israël va se retrouver confronté à d’autres virus, et d’origine étrangère.

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12 janvier 2012 - Al Ahram Weekly - Vous pouvez consulter cet article à :
http://weekly.ahram.org.eg/2012/108...
Traduction - Info-Palestine.net - Claude Zurbach


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