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Israël expulse des enfants afin de préserver le « caractère juif » de l’État

jeudi 8 septembre 2011 - 06h:38

J. Kestler-D’Amours - EI/IPS

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La politique israélienne le stipule expressément : ces travailleurs migrants qui donnent naissance à un enfant doivent, ou envoyer leur nouveau-né dans leur pays d’origine, ou le garder avec eux mais alors ils perdent leur visa de travail.

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Israël vient d’arrêter et essaie d’expulser une travailleuse migrante et son petit.
C’était le mois dernier.
Oren Ziv/Actives Stills




Quand Israël a essayé d’expulser les enfants des premiers travailleurs immigrés qui étudiaient dans son système scolaire, des organisations des droits de l’homme ont demandé au gouvernement israélien d’élaborer une politique claire de l’immigration et un protocole officiel qui permettent de minimiser l’impact psychologique sur les jeunes enfants détenus et expulsés.

« Nous demandons que le gouvernement fasse montre d’humanité et de compassion à l’égard de ces enfants et de leurs familles, et essaie de travailler à une politique qui, d’une part n’expulse aucun enfant tout en faisant venir de (nouveaux) migrants en Israël et d’autre part ne les prive pas de leur droit à fonder une famille », déclare Moriel Matalon, président de l’UNICEF/Israël.

Pour Matalon, outre les effets négatifs de cette politique de « porte tournante » pour l’immigration, mettre les enfants des travailleurs migrants en prison avant leur expulsion constitue une violation flagrante de la Convention des Nations-Unies relative aux droits de l’enfant, dont Israël est signataire.

« Mettre des enfants et leurs parents en prison ou en détention, même pour une période temporaire, est injustifié. Cela peut avoir un effet négatif énorme sur l’éducation de l’enfant » dit Matalon. « Ces enfants n’ont commis aucun crime que ce soit. Il n’y a aucune raison pour qu’ils passent ne serait-ce qu’un instant en prison. »

En juillet 2009, le gouvernement israélien a annoncé son intention d’expulser 1200 enfants de travailleurs migrants sans papiers. Après bien des critiques, une commission interministérielle a finalement approuvé l’expulsion de 400 enfants en août de l’année dernière, tout en informant les 800 autres qu’ils pouvaient faire une demande pour avoir le statut de résident permanent en Israël, à condition de répondre à certaines exigences.

Entre autres critères : l’obligation pour l’enfant de parler l’hébreu couramment, d’être inscrit dans le système scolaire israélien en première année ou plus, d’être né en Israël ou d’y être entré avant l’âge de 13 ans, d’être en Israël depuis cinq années consécutives, et d’avoir des parents entrés en Israël légalement.

« Considérations sionistes »

Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, avait déclaré à l’époque : « Nous sentons tous, et comprenons, le c ?ur des enfants. Mais d’un autre côté, nous avons les considérations sionistes et à garantir le caractère juif de l’État d’Israël. Nous ne voulons pas créer d’incitation à un afflux de centaines de milliers de travailleurs migrants illégaux ».

Mais beaucoup des travailleurs sans papiers ont perdu leur statut légal simplement par le fait d’avoir donné naissance à un enfant, car la politique israélienne le stipule expressément, ces travailleurs migrants qui donnent naissance à un enfant doivent, ou envoyer leur nouveau-né dans leur pays d’origine, ou le garder avec eux mais alors ils perdent leur visa de travail.

En avril de cette année, la Cour suprême israélienne a statué que cette loi était anticonstitutionnelle.

« Forcer une femme à choisir entre son maintien dans son emploi, concrétisant ses aspirations financières légitimes, et son droit à la maternité est incompatible avec les perceptions normatives et constitutionnelles de la société israélienne. Concevoir des choix d’une telle façon constitue d’abord et avant tout une violation du droit des travailleurs migrants à la fonder une famille » a argué la Cour dans son arrêt.

Comme la décision de la Cour n’a pas d’effet rétroactif, les travailleurs migrants qui ont donné naissance à un enfant avant cette décision restent dans l’attente de leur expulsion, avec leur enfant. Selon Noa Galili, porte-parole d’Enfants israéliens, une organisation qui milite pour faire cesser les expulsions et garantir aux enfants un statut de résident permanent en Israël, ce sont une soixantaine d’enfants qui ont été expulsés à ce jour.

Pas de médecins pour les détenus

« Il n’existe aucun protocole officiel (pour l’arrestation et l’expulsion des enfants), ainsi par exemple il n’y a aucun médecin dans les centres de détention (à l’aéroport Ben Gourion de Tel Aviv) spécifiquement pour les enfants. Les travailleurs sociaux n’y sont pas présents en permanence. Les mères disent qu’il n’y a pas assez de lait pour les bébés, ou d’eau pour laver les enfants. C’est vraiment, vraiment problématique ».

Ce manque de politique officielle sur la façon de procéder aux arrestations, à la détention et à l’expulsion des travailleurs migrants et de leurs enfants, provoque de graves dégâts sur le bien-être psychologique des enfants, affirme Galili.

« Dans beaucoup de cas, nous voyons ces enfants réagir avec anxiété. Nous avons vu de nombreux cas où les enfants se mettent à vomir, parce que c’est comme cela qu’ils réagissent à leur arrestation. Il n’y a aucune instruction, aucune instruction écrite, et c’est ce que nous demandons depuis le début des arrestations : qu’il y ait un protocole sur la façon d’arrêter les enfants ».

Pour finir, Galili estime que le gouvernement israélien devrait accorder aux enfants un statut de résident permanent parce qu’ils sont nés en Israël, qu’ils n’ont nulle part ailleurs où aller, et parce que leurs parents sont entrés légalement dans le pays.

« La question pour nous n’est pas de demander la promulgation d’une loi pour qu’à partir de maintenant, tous les enfants nés en Israël obtiennent ce statut, nous voulons que soit instaurée une législation sur l’immigration pour que tous les enfants qui sont présents aujourd’hui, obtiennent le statut » dit-elle. « Il ne s’agit que d’un tout petit nombre d’enfants, et les expulser leur causera le plus grand traumatisme de leur vie. »

Sur la politique israélienne à l’égard des enfants d’immigrés, voir notamment :

- Les enfants « interdits » d’Israël - Mya Guarnieri - Al Jazeera
- Israël : malaise croissant devant la dépendance vis-à-vis de la main-d’oeuvre immigrée - Dan Levin - New York Times
- Netanyahu : les immigrés clandestins africains sont une menace pour le caractère juif d’Israël - Barak Ravid - Ha’aretz

Jillian Kestler-D’Amours est une journaliste canadienne indépendante vivant à Jérusalem. Elle contribue régulièrement avec The Electronic Intifada, Inter-Press Service et Free Speech Radio News.

Son site : http://jkdamours.com

De Jillian Kestler-D’Amours :

- Carte postale de Jérusalem : à la recherche de l’histoire cachée du parc Canada
- Dans la vallée du Jourdain, exister c’est résister
- Ce qui se cache derrière l’arrestation des enfants palestiniens
- Golan occupé : « la récolte de sang » de l’armée israélienne
- Bédouins : Des indigènes devenus squatteurs sur leurs terres
- Les Palestiniens de Jérusalem, défiant Israël, clament : « Nous resterons ici »

Jérusalem, le 1er septembre 2011 - The Electronic Intifada - Inter Press Service - traduction : JPP


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