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A la recherche de nouvelles connivences

lundi 5 septembre 2011 - 06h:43

Saleh Al-Naami - Al Ahram

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Le virage dans les relations israélo-turques s’est révélé un avantage pour les états balkaniques et la Grèce qui se disputent pour faire les yeux doux à Israël, nous écrit Saleh Al-Naami depuis Gaza.

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Papandreou [à g.] est prêt à vendre son pays en pièces détachées aux multinationales, mais aussi à compromettre la Grèce définitivement avec un pays raciste, belliciste, colonialiste...

Le Premier Ministre polonais Donald Tusk fut surpris quand, en décembre dernier, son homologue grec, Georges Papandreou, a interrompu leur réunion au quartier général du gouvernement à Varsovie demandant s’il pouvait avoir une chambre privée pour donner « des appels importants » à son cabinet à Athènes. Quand Tusk a demandé quelle était l’urgence, les assistants de Papandreou l’ont informé que le Premier Ministre israélien Benjamin Netanyahou avait demandé l’aide de la Grèce pour éteindre les feux flambant sur le Mont Carmel entourant Haifa et que le ministre grec tenait beaucoup à envoyer de l’aide.

Ceci est peut être une des rares fois qu’un dirigeant d’un pays met fin à une réunion avec un autre dirigeant mondial simplement pour surveiller la coordination de l’aide à un pays tiers. Mais cet incident montre l’immense transformation des relations entre Israël et la Grèce ainsi qu’avec d’autres états balkaniques, malgré le fait que la Grèce fut le dernier état européen à établir des relations diplomatiques avec Israël en 1992.

Ironiquement la Grèce est l’état européen qui a sauvé Israël des répercussions de la Flotille Liberté II qui naviguait vers les rives de Gaza, bloquant ainsi le scénario cauchemardesque craint par Israël c-à-d une confrontation sur les bateaux entre la marine israélienne et les activistes, scénario que le gouvernement de Netanyahou a essayé d’éviter à tout prix. L’ironie est que jusque très récemment la Grèce était un des plus ardents défenseurs des causes arabes parmi les états européens et soutenait le peuple palestinien. De fait, le soutien de la résistance palestinienne contre l’occupation était une question unificatrice entre les adversaires politiques sur la scène politique grecque.

Le parti socialiste grec, PASOK, spécialement sous la conduite de Georges Papandreou et d’Andreas Papandreou - respectivement le grand père et le père du Premier Ministre en place - qui ont également été Premier Ministres, était le plus ardent soutien de la cause palestinienne. Le dernier président palestinien était un ami personnel d’Andreas Papandreou.

Depuis le début de juin 2010, les liens israélo-grecs ont changé drastiquement et ont culminé dans une déclaration de Papandreou et de Netanyahou, durant la visite de ce dernier à Athènes il y a quelques mois, par laquelle les deux gouvernements ont accepté de coopérer dans les domaines du renseignement et de la sécurité. Ils ont décidé qu’un comité conjoint coordonnerait la coopération stratégique et de développer la coopération dans les domaines politiques et économique. Ce partenariat a vite été transformé en services stratégiques critiques pour Israël, comme l’autorisation pour les forces aériennes israéliennes d’effectuer des jeux guerriers au-dessus des territoires grecs. Jusqu’à présent Israël a effectué deux exercices militaires en 2010 et 2011.

L’accord est intervenu à un moment difficile pour Israël car il suivait de peu la décision de la Turquie d’interdire l’usage de l’espace aérien turc aux forces aériennes israéliennes en réponse aux évènements de la Flotille Liberté I fin mai 2010. L’espace géographique réduit d’Israël exigeait de chercher l’aide de la Turquie pour effectuer d’importants exercices aériens d’autant plus, qu’à ce moment, les dirigeants israéliens projetaient d’attaquer les installations nucléaires iraniennes comme première option pour traiter le programme nucléaire iranien. Comme reconnaissance de l’importance des liens entre les deux parties, Israël a nommé un vétéran diplomatique, Arye Mekel, comme Ambassadeur à Athènes - à Tel Aviv il est connu comme le meilleur expert en relations diplomatiques et internationales.

La Turquie, qui fut un temps l’un des plus proches alliés d’Israël, est le grand ennemi de la Grèce, c’est pourquoi les dirigeants à Tel Aviv et Athènes ont saisi l’occasion de forger de nouveaux liens entre eux. Les Israéliens recherchaient des alternatives pour compenser la perte de coopération militaire entre Ankara et Tel Aviv, surtout les exercices aériens, la coopération dans les renseignements, les transactions d’armes, etc. Ces développement ont permis à Athènes d’utiliser ses relations avec Israël pour affronter la crise économique critique écrasant la Grèce.

Israël s’est rendu compte du potentiel de liens étroits avec la Grèce et leurs avantages stratégiques pour l’entité sioniste et a donc manipulé l’histoire hostile entre la Turquie et la Grèce en soulignant l’importance de développer les relations entre Tel Aviv et Athènes pour contrer les « ambitions » turques. Le chercheur israélien Abirama Golan déclare que les dirigeants israéliens ont souvent attiré l’attention des officiels grecs sur ce que le Ministre turc des Affaires étrangères Ahmet Davutoglu a écrit dans son livre Strategic Depth comme preuve de l’ambition d’Erdogan de réincarner l’empire ottoman dans les temps modernes et avec de nouveaux outils. Le livre de Davutoglu est également la preuve de la tentative néo-ottomane de retrouver l’influence antérieure du pays.

Les Israéliens n’hésitent pas à utiliser des hostilités historiques enracinées dans l’ère durant laquelle la Grèce et d’autres états balkaniques ont été soumis à la domination ottomane durant des centaines d’années. L’Ambassadeur israélien auprès de la Bulgarie Noah Gal-Gendler admet qu’Israël se concentre sur le contexte historique et culturel comme stimulant pour encourager tous les états balkaniques à coopérer avec l’entité sioniste. Elle s’appuie aussi sur l’islamophobie en Europe pour créer des liens sur de nouvelles bases avec ces pays.

Pendant ce temps Papandreou a réalisé que l’aide de l’UE ne sera pas suffisante pour sauver la Grèce de la catastrophe économique et qu’elle doit accroitre les investissement étrangers dans le pays. Son gouvernement a exercé de grands efforts pour convaincre les firmes étrangères d’investir en Grèce quand les dirigeants israéliens se débattaient pour trouver un moyen d’empêcher la Flotille Liberté II de naviguer vers Gaza. Si Israël allait à nouveau employer la force pour arrêter le convoi il léserait encore plus son image déjà endommagée sur la scène mondiale et nuirait également aux liens avec les pays dont les nationaux seraient sur les navires, en solidarité avec les Palestiniens.

Israël a utilisé la crise économique grecque pour servir ses propres intérêts. Le gouvernement de Netanyahu a consulté les principales organisations juives des EU pour manipuler les conditions économiques épouvantables de la Grèce au bénéfice de Tel Aviv. Le bureau de Netanyahu et les dirigeants des principales organisations juives dans les EU se sont mis d’accord pour qu’une délégation des représentants de ces organisations se rendraient à Athènes pour rencontrer Papandreou et lui promettre qu’elles s’efforceraient de convaincre les compagnies américaines et les hommes d’affaires juifs d’investir en Grèce. En retour la Grèce empêcherait la Flotille Liberte II to de quitter les ports grecs. Accord conclu, le gouvernement grec a expliqué que sa décision d’interdire aux navires de quitter ses ports se basait sur la sécurité nationale de la Grèce.

La position officielle de Washington et du Secrétaire général des NU, fermement opposés à la navigation de la Flotille Liberté II vers Gaza, a également joué un rôle dans la décision de la Grèce. Pendant ce temps Netanyahou a informé Papandreou qu’ Israël pouvait aider la Grèce à venir à bout de sa crise économique en encourageant des centaines de milliers de touristes israéliens à visiter la Grèce plutôt que la Turquie - antérieurement destination favorite des touristes israéliens. Netanyahu a dit à Papandreou que 400.000 Israéliens recherchent des destinations touristiques et a suggéré de promouvoir des offres touristiques communes vers Tel Aviv et Athènes.

Un des raisons pourquoi la Grèce développe des relations avec Israël est qu’elle a besoin du soutien de Washington dans son conflit avec la Turquie au sujet de l’avenir de Chypre et la supposition que la coopération avec Israël améliorerait sa position auprès des EU. Tandis que l’attention était concentrée sur l’amélioration vertigineuse des relations gréco-israéliennes, en réalité la plupart des états balkaniques sont à présent très intéressés à nouer des liens avec Israël et se font concurrence pour offrir des services stratégiques à l’entité sioniste.

Le Premier Ministre bulgare Boyko Borisov a visité Israël il y a quelques mois et à proposé à Netanyahou que les forces aériennes israéliennes s’exercent dans l’espace aérien bulgare. Plutôt étrangement Borisov a également rencontré le chef du Mossad de l’époque, Meir Dagan, et a offert de coopérer avec Israël dans les domaines de la sécurité et des renseignements. Le Premier Ministre bulgare a également invité Dagan à visiter Sofia et a autorisé les journaux bulgares a publié des photos de sa rencontre avec le responsable du Mossad - couverture médiatique inhabituelle pour la visite de n’importe quel chef du Mossad dans un pays étranger. Naturellement Borisov voulait quelque chose en retour. Il a demandé à Israël d’aider à développer l’industrie technologique avancée de la Bulgarie et de recevoir un pourcentage de touristes israéliens qui voyageaient auparavant en Turquie.

Des liens plus étroits entre Israël et la Grèce et la Bulgarie s’observent également en Roumanie qui a précédé la Grèce en autorisant Israël à utiliser son espace aérien pour des exercices militaires. Mais la coopération a pris fin après l’explosion d’un hélicoptère au-dessus de la Roumanie il y a un an, qui a tué plusieurs pilotes israéliens. Pendant ce temps la Slovénie, la Croatie et la Macédoine ont également exprimé leur intérêt d’améliorer leurs relations avec Israël.

Il semble probable que les états balkaniques soutiendront la position israélo-américaine de rejeter la demande de la Ligue Arabe d’accorder à l’état palestinien le statut de membre des NU en septembre.

Du même auteur :

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28 juillet 2011 - Al Ahram Weekly - Vous pouvez consulter cet article à :
http://weekly.ahram.org.eg/2011/105...
Traduction de l’anglais : Lisette Cammaerts


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