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Palestine : l’Europe est autant coupable que les Etats-Unis

jeudi 15 mars 2007 - 00h:35

Walid M. Awad - Palestine Times

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Il est presque impossible de trouver partout dans le monde un pays plus contrôlé qu’Israël. S’il y avait une place dans le livre des records [Guinness World record] pour le pays disposant des barrières et murs les plus étendus, Israël remplirait ces conditions. Ses soldats, sa police des frontières et ses gardes sont omniprésents. Ils sont partout, dans toutes les villes, routes et et croisements. Ils sont présents sur la frontière au sud avec l’Egypte et Gaza, au nord à la frontière avec le Liban et la Syrie, et au centre renforçant un impitoyable régime d’Apartheid mis en place pour bloquer progressivement la vie des Palestiniens.

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Mahmoud Abbas (à gauche sur la photo) en visite officielle à Paris - Photo : Reuters/Patrick Kovarik

En regard de tout cela, Israël parait être un des pays les plus peureux et les plus en situation d’insécurité. Il craint une répétition des évènements de la seconde guerre mondiale et doute de son avenir en tant qu’état juif. En plus de répondre à un des objectifs centraux israéliens - confisquer encore plus de terre de Palestine - les murs d’Israël sont une autre manifestation de sa peur du présent. Cette peur est à l’origine de son refus constant d’abandonner sa main-mise sur les territoires Palestiniens, même si cela implique de défier les résolutions des Nations Unies et les avis de la Haute Cour de Justice de la Haye. Cette peur fait qu’Israël, son état et sa population, apparemment s’immunisent contre toute censure : commettant des atrocités, perpétuant les harcèlements et mauvais traitements, volant la terre et détruisant les propriétés du peuple de Palestine, le tout au nom de la sécurité. Cette situation porte en elle, entre beaucoup d’autres choses, un gigantesque coût financier et une lourde facture. Ceci nous amène à poser la question : qui paye la note ?

Le peuple de Palestine a été et est toujours la victime des peurs historiques et actuelles du peuple juif. Que peut-on faire pour dissiper ces peurs de façon à ce qu’Israël relâche sa griffe sur le peuple de Palestine et sur sa tere ? Cette question pousse l’Europe, ses gouvernements et ses populations, au centre de la scène. La peur installée physiquement et psychlogiquement dans le peuple juif est le résultat du traitement subi dans le passé en Europe, depuis les premiers jours de l’Inquisition jusqu’à l’époque nazie des années 1930 et 40. Afin de compenser les persécutions infligées aux communautés juives, les pays européens, en particulier la France et la Grande-Bretagne et chacune pour des raisons qui lui sont propres, ont joué un rôle majeur dans la mise en place d’Israël.

L’Europe a renforcé Israël politiquement, économiquement et militairement et l’a rendu capable de tenir sur ses propres jambes. L’arsenal nucléaire israélien est le résultat de l’assistance financière et technologique déterminée de la France et de la Grande-Bretagne. Dans les années 1960, l’Allemagne a contribué au renforcement de l’armée israélienne en versant de lourdes compensations sous la forme de matériel militaire et d’argent, qu’elle continue d’ailleurs de fournir. La France a été un autre des principaux fournisseurs d’armes pour Israël. En 1967, Israël a réussit à défaire militairement trois pays arabes et a occupé un espace représentant près de six fois sa propre taille (la Cisjordanie, la Bande de Gaza,les hauteurs du Golan et la péninsule du Sinaï).

L’Europe est aussi le premier partenaire commercial d’Israël. Sur les fronts diplomatiques et politiques, l’Europe, de concert avec les Etats-Unis, fournit tout un réseau de protection à Israël. Ces deux entités sont les soutiens d’Israël, et aucune violation des droits de l’homme ni aucune agression contre le peuple de Palestine ne va altérer ce soutien. Israël sera parfois critiqué, quelques fois blâmé, mais quand les effets se dissipent les européens et les américains se retrouvent en ligne derrière Israël sur quelque sujet que ce soit.

Ce support américano-européen sans limite en faveur d’Israël a provoqué en retour un sentiment anti-américain et anti-européen dans le monde Arabe et Musulman, et ce support est certainement la première cause de l’animosité et de l’opposition grandissantes que rencontrent l’Europe et les Etats-Unis dans le monde Arabe et Musulman.

Si l’on se fie à ses dernières déclarations, le premier ministre Ehud Olmert n’est pas disposé à discuter la question d’un accord final ou la mise en place de la seconde phase de la feuille de route avec le président Palestinien Mahmoud Abbas. « Mes discussions avec le président Palestinien porteront sur la façon de contenir le terrorisme et sur la qualité de vie des Palestiniens, » a déclaré Olmert la semaine passée. Une autre déclaration attribuée à Olmert ce vendredi nous apprend que son gouvernement ne rencontrera aucun membre du gouvernement unitaire palestinien, y compris les ministres appartenant au Fatah.

Les Palestiniens ont oublié la signification d’une phrase comme « qualité de vie » depuis beaucoup d’années et ont pris l’habitude d’attendre le pire de la part de leurs occupants.

Les déclarations des dirigeants israéliens en ce qui concerne la Palestine sont vides de sens, pleines de mots creux, autant que décevantes. Mardi dernier la ministre israélienne des affaires étrangères Tzipi Livni a fait une déclaration au journal Al’Ayyam où elle disait qu’Israël ne pouvait pas accepter l’Initiative de Paix Arabe de mars 2002 dans sa forme actuelle et demandait à ce que les dirigeants Arabes améliorent leur inititiative. Un message affiché sur le serveur Internet du ministère israélien des affaires étarngères avertit : « N’embellissez pas la réalité - le Hamas n’a pas changé. »

Personne ne remarque quelque chose ici ? Les Arabes et les Palestiniens sont ceux à qui on demande en permanence de changer. La question qui appelle ici une réponse est : est-ce qu’Israël a jamais changé ? La réponse est non ; et aujourd’hui Israël est le côté sur lequel il faut faire pression pour qu’il change. L’Europe et les Etats-Unis peuvent apporter sûreté et sécurité à Israël dans ses frontières d’avant 1967. Et ce sont eux qui doivent faire pression sur Israël pour qu’il se plie à ses obligations. Les pays Arabes, appelés aussi « les sources bien informées » persistent à nous dire qu’ils manquent de la capacité, de la volonté, ou de la puissance militaire pour battre Israël. Nous devrions penser aussi que le monde Arabe ne peut sur le plan diplomatique et économique menacer les intérêts américains et européens. Les deux assertions sont fausses. Numériquement, quantitativement, et autant qualitativement, les peuples Arabes peuvent faire beaucoup pour changer le cours des évènements mondiaux, et pour le bien de tous. Tout ce dont ils ont besoin, c’est de confiance en soi, d’organisation et de volonté.

Jusqu’à cet instant, et dans de telles circonstances, que peut faire une population palestinienne dévastée vivant sous occupation ? Face à tout cela, peut de chose. Mais en réalité, la clef pour un état israélien en sécurité et un Moyen-Orient stabilisé dépend de la conquête par les Palestiniens de leurs pleins droits. Les politiques israéliennes obstinées et soutenues par l’Ouest peuvent amener quelques gains à Israël sur le plan tactique mais beaucoup de difficultés supplémentaires dans notre région à l’Amérique et à l’Ouest. En définitive, malgré tout, personne ne peuvent fournir à Israel la légitimité dont il a besoin ou favoriser une meilleure image pour l’Occident dans notre région, sans en passer par une juste solution pour les Palestiniens.

Pour que ceci se produise, les Etats-Unis doivent repenser leur relation avec Israël. Le American Cato Institute a raison losrqu’il dit, dans une étude présentée au Congrès Américain que l’importante aide économique et militaire que Washington fournit à Israël ne sert pas nécessairement les intérêts stratégiques américains. L’institut argumente en expliquant que l’assistance des Etats-Unis au profit d’Israël n’incite pas seulement ce dernier à adopter des comportements qui enflamment les sentiments anti-américains dans le monde Arabe, mais que cette aide va à l’encontre même des propres intérêts d’Israël en empêchant son intégration au Moyen-Orient. L’institut recommande que Washington, dans un délai rapproché, ampute l’aide économique vers Israël du montant dépensé pour la construction de colonies dans les Territoires Palestiniens, et conditionne l’aide militaire à la non-utilisation des armes d’origine américaines contre des civils.

L’aide annuelle officielle des Etats-Unis au profit d’Israël dépasse 4 milliards de dollars. Au début des années 1990, les Etats-Unis fournissaient des garanties bancaires pour un montant de 10 milliards de dollars. En 2003, les Etats-Unis ont fourni le même type de garanties pour un montant de 9 milliards de dollars. Revenons à la question posée précédemment : comment Israël finance-t-il tout cela ? La réponse est : grâce au contribuable américain.

L’institut Cato appelle aussi l’Union Européenne à jouer un rôle plus actif sur les plans diplomatique, économique et militaire au Moyen-Orient, et spécialement par des inititiatives européennes pour favoriser une médiation dans le conflit entre Israël et la Palestine. « Grâce à sa proximité géographique, sa dépendance énergétique vis-à-vis des fournisseurs du Golfe et ses liens économiques et démographiques étroits, dont une large communauté d’immigrants d’origine arabe, l’Europe devrait être une force dominante dans la région. »

Mardi dernier, le commissaire européen aux relations extérieures Benita Ferrero-Waldner a demandé à ses hôtes israéliens qu’ils fassent plus pour exploiter les opportunités avec l’Union Européenne dans les domaines énergétiques, économiques, des transports et de la recherche. L’Europe est le principal partenaire économique d’Israël ; plus de 30% des exportations israéliennes vont en Europe dont des produits fabriqués dans des colonies juives installées dans les Territoires Palestiniens.

Où se place le peuple de Palestine dans cette équation ? L’Union Européenne, membre du Quartet, occulte ses responsabilités envers les Palestiniens qui ont été transformés en victimes des persécutions infligées auparavant aux communautés juives en Europe. Les Européens ont autant de responsabilité que les Américains pour tirer le peuple de Palestine de sa crise actuelle. Le peuple de Palestine doit voir que des engagements sont pris et constater des changements sur le terrain, et non pas recevoir juste quelques miettes d’assistance ou des mots creux de la part de l’Europe et de ses dirigeants.

7 mars 2007 - Palestine Times
Traduction : Claude Zurbach [Info-Palestine.net]


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