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Pluie de bombes sur les civils libyens. Qui espèrent encore...

vendredi 27 mai 2011 - 06h:58

Marinella Correggia - Il Manifesto

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« Est-ce possible : bombarder l’après-midi, juste à côté d’une université ? Heureusement qu’il n’y avait pas d’étudiants : nous avions fermé, ce jour-là, à cause d’un problème survenu la veille ».

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Tripoli, 12 mai 2011 - Enterrement de victimes des bombardements de l’OTAN sur la capitale libyenne - Photo : AFP

Ali Mohamed Mansour, originaire de Ajdabiya et recteur de la faculté d’économie et de sciences politiques de l’université Al Fateh, explique que c’est un camp militaire hors d’usage qui a été visé et touché, mais que le déplacement d’air a endommagé les salles de l’université. Il nous montre les lourds plafonds de ciment écroulés, les vitres brisées : « Quels Libyens protège-t-on et quels sont ceux qu’on veut éliminer ? ».

A l’Académie des études supérieures, le directeur Milad Salad Milad nous montre sur son ordinateur la photo de sa fille Safà, deux ans et demie. La première nuit de bombardements, deux missiles sont tombés à 500 mètres de chez eux. En deux mois, Safà s’est plus ou moins habituée. Son père par contre ne s’est pas habitué à un autre fait : « Je me sens trahi par nos amis universitaires d’avant. Nous avions des contacts avec des centaines d’entre eux. Et deux seulement se sont manifestés, de l’étranger, depuis que la guerre a commencé. L’establishment ne m’intéresse pas, les Berlusconi qui passent du baisemain au poignard, mais mes collègues... pourquoi ? A cause, je crois, des mensonges quotidiens de la plupart des media ».

Leila, étudiante de Sabrata, et Sausan, revenue des Etats-Unis il y a six ans avec un master d’anglais, demandent pourquoi les media mentent et pourquoi l’ONU ne cherche pas la vérité. Réponse du professeur Saad Al Ghariani, enseignant de gestion des eaux : « Parce qu’en guerre la vérité n’a pas de dents1. Et dans le cas libyen le type d’intervention extérieure choisi a accentué le conflit au lieu de le modérer ».

L’ingénieur Abdusalam Daghais s’arrête sur le projet de société des opposants de l’est : « Un groupe hétérogène avec une seule idée fixe : Kadhafi doit partir. Mais que veulent-ils pour le pays ? Plusieurs leaders de la révolte sont des anciens du régime. Ils sont parmi les responsables de la politique libyenne de ces derniers lustres. Et de la corruption aussi. D’autres sont à peine rentrés, après des décennies passées à l’étranger. Des aliens. Et puis parmi eux il y a des islamistes d’extrême-droite, des monarchistes, d’autres qui se disent communistes. Comment se mettront-ils d’accord ? Leur leader, Jibril, dit que la Libye devra devenir une économie de services. Il veut dire nous vendre au tourisme ? ».

Le professeur Al Ghariani poursuit : « Je ne suis pas un politicien, je vis modestement dans un appartement et je gagne ma vie comme enseignant, donc je peux me permettre de dire quelque chose sur le « Kadhafi dictateur ». C’est un mauvais usage du terme et pas tellement parce que formellement il n’a pas de charges : dans une structure comme celle de la Libye dirigée par les tribus, un leader

est accepté s’il connaît les besoins de la population et arrive à les satisfaire. Et pendant ces dix dernières années les choses s’amélioraient. Cette guerre tue la fleur en bouton. La majorité des Libyens désire des changements, la lutte contre la corruption, mais n’accepte pas cette énorme crise créée par un groupe restreint ».

Entre-temps, samedi dernier (21 mai 2011) s’est terminée la visite de notre groupe international, Global Civilians for Peace in Libya, invité par l’ONG Fact Finding Commission qui essaie de recueillir depuis Tripoli des preuves et des témoignages sur la guerre en Libye et sur les mensonges et réticences qui y sont attachés. Même si cela a toujours eu lieu sous l’ ?il attentif de nos anges gardiens libyens, des choses nous en avons vues et des témoignages nous en avons entendus pour nous faire une idée.

Les Global Civilians (à qui le vice-ministre des affaires extérieures Khaled Khaim a dit qu’il espérait beaucoup du sommet des chefs d’Etat de l’Union africaine prévu pour aujourd’hui -25 mai 2011, NdT- à Addis Abeba) en appellent à l’Ua, à l’ONU et à la Ligue Arabe pour que soient menées des enquêtes sérieuses sur le terrain. La délégation dénonce l’attaque de l’OTAN contre des infrastructures civiles et contre des citoyens. Et le silence des media face aux diverses preuves vidéos et témoignages d’atrocités commises par les alliés libyens de la « coalition des volontaires ».

Les victimes de guerre, affirme-t-elle, sont des dizaines de milliers si on tient compte des personnes évacuées. Le sort des migrants est pire, si tant est que ce soit possible. Et à ce propos : les anciens travailleurs africains d’origine sub-saharienne en Libye orientale sont dans une « situation d’extrême urgence » selon ce que dénonce la Fédération internationale des droits de l’homme (Fidh). Malmenés, volés, licenciés sans paye, dans certains cas tués, les femmes souvent violentées (la même accusation, inversée, parle de 270 femmes victimes des « viols de guerre » des troupes de Kadhafi).

Mais au contraire de cette partie de la Libye sous contrôle de Kadhafi, où on a beaucoup parlé de toutes sortes d’atrocités, dans les pays et dans les journaux du démocratique Occident le sort de ces migrants semble n’intéresser et n’indigner personne.

25 mai 2011 - Il Manifesto - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.ilmanifesto.it/area-abbo...
Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio


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