16 septembre 2017 - CONNECTEZ-VOUS sur notre nouveau site : CHRONIQUE DE PALESTINE

Globalisation de l’occupation

lundi 10 juillet 2006 - 14h:44

Jamal Juma

Imprimer Imprimer la page

Bookmark and Share


" Nos espoirs n’existent que dans les peuples eux-mêmes, pour accélérer le boycott, le désinvestissement et les sanctions pour isoler l’Israël de l’apartheid et le punir des crimes de guerre qu’il perpétue contre nous. Dans ceux qui nous soutiennent, parmi des millions de personnes qui luttent pour la justice dans le monde, et que nous voyons impulser les actions de solidarité et rendre au droit international quelque dignité."


JPEG - 24.8 ko
Des Palestiniens manifestent contre l’incursion israélienne, le 8 juillet 2006 (MaanImages/K. Reash)

Cette année, le 9ème jour de juillet est un jour amer pour les Palestiniens. L’armée d’occupation assiège Gaza, massacre sa population et attaque ses infrastructures. Les ghettos de Cisjordanie prennent forme alors que la fin de la construction du mur d’apartheid se rapproche et que l’exode palestinien de Jérusalem a commencé. Plus de 9 000 Palestiniens croupissent dans les cellules des prisons israéliennes tandis que les Palestiniens qui sont restés sur les terres de 1948 sont soumis au système d’apartheid le plus brutal et discriminatoire.

La brève euphorie d’il y a deux ans, avec l’avis de la Cour international de Justice contre le mur, est passée depuis longtemps. Certains, en Palestine, ont salué comme une victoire du droit international la décision qui jugeait le mur illégal et condamnait l’occupation parmi d’autres crimes israéliens. Elle demandait à la communauté internationale de faire respecter la Quatrième Convention de Genève et « de n’apporter aucune aide ou assistance au mur et au régime impliqué. »

Deux années plus tard, alors que le peuple palestinien se prépare à une marche vers les bureaux des Nations unies, il sait que personne n’a profité de ce verdict pour arrêter l’escalade de l’occupation en Palestine. Les sinuosités du mur d’apartheid à travers le pays - lequel est en voie d’achèvement - formant un système élaboré de maîtrise avec les routes protégées réservées aux colons, volent 48 % de la terre de Cisjordanie. Les Palestiniens de Gaza, dont 80 % sont des réfugiés expulsés de leur terre en 1948, sont emprisonnés derrière deux murs. Coupés du reste du monde, leur privilège après la feinte du « désengagement » est de mourir de faim dans la plus grande prison à ciel ouvert du monde, soumis à des bombardements continus, à des bangs soniques et aux fermetures des services collectifs.

Face à ces crimes, alors que les Palestiniens luttant pour leur liberté appellent à une plus grande solidarité, la réaction de la communauté internationale et des Etats membres des Nations unies est de manifester leur dédain à l’égard des efforts des Palestiniens pour se libérer des chaînes de l’occupation. La communauté mondiale plaide pour la libération d’un soldat israélien capturé dans son tank posté en dehors du ghetto de Gaza, pendant que des Palestiniens sont tirés de leur lit et tués dans les rues et que la moitié de leur gouvernement et le tiers du Conseil législatif sont pris en otages. La communauté supplie pour le retour du soldat alors qu’elle ignore les 9 000 Palestiniens qui se décomposent dans les prisons israéliennes, dont plus de 400 enfants.

Les organismes mondiaux se contentent de missions d’informations sur « la situation palestinienne », spéculant sans fin sur des questions humanitaires comme si la Palestine était sous le coup de quelque désastre naturel. Débiter des rapports humanitaires des Nations unies n’est pas ce qu’on demande. Les Palestiniens n’ont pas besoin d’être ciblés par la Banque mondiale pour leur pauvreté ni d’un appui rhétorique creux des gouvernements dont les paroles ne sont pas suivies par les besoins. Les faits sur le terrain en Palestine, tout le monde peut les voir. Nous avons besoin d’action. Nous avons besoin de pression politique sur l’occupant. Nous avons besoin de liberté.

La façon dont la communauté internationale a traité la décision de la Cour internationale de Justice - comme toutes les résolutions des Nations unies notamment celle pour le droit au retour des réfugiés - montre que l’ONU est une institution impuissante et discréditée, dans laquelle les puissants au Conseil de sécurité continuent de superviser et d’être favorables à l’expulsion de notre peuple.

La résolution de l’Assemblée générale qui a approuvé l’avis de la CIJ demandait uniquement au Secrétaire général d’ouvrir un registre pour noter les dommages et les pertes causés par le mur. Créer un registre pour des dommages toujours croissants, au lieu de prendre des mesures concrètes pour faire pression sur Israël pour le démantèlement du mur est d’une absurdité évidente. Pire encore, le Secrétaire général a même refusé de se rendre sur le mur, préférant éviter de provoquer ses maîtres, à Washington et à New York, qui tirent les ficelles. Et maintenant, il apparaîtrait que le registre ne pourrait permettre de procéder à aucune évaluation des pertes, ce qui garantit efficacement qu’il n’y aura aucune réparation d’exiger auprès de l’occupant. Ceci garantit que le criminel pourra poursuivre ses crimes de guerre, dont d’ailleurs, il ne sera jamais tenu pour responsable.

Alors que le silence des nations pourrait choquer, les Palestiniens et ceux qui les soutiennent sont bien conscients des machinations habiles des puissances du monde, complices de l’occupation. De plus en plus, ils sont les témoins de gouvernements fuyant leurs responsabilités au regard du droit international et poursuivant la globalisation de l’occupation. Maintenant, la communauté, avec Israël, sanctionne le peuple palestinien pour avoir exercé un vote démocratique, comme le monde le lui avait demandé.

Ils cherchent à renverser la direction palestinienne qui refuse de se plier à la volonté de l’occupant. En même temps, il y a l’intention de créer de nouveaux mécanismes de contrôle pour contourner l’Autorité palestinienne et toutes les institutions démocratiques responsables du peuple palestinien. Le résultat est le Mécanisme international provisoire (MIT), la nouvelle structure concoctée par l’Union européenne pour faire assurer le contrôle politique et économique par la Banque mondiale afin de réglementer et de soumettre le peuple palestinien. Le mécanisme est apparemment conçu pour détruire la structure administrative de l’Autorité palestinienne (sauf le cabinet présidentiel) tandis que les banques internationales vont distribuer de l’argent pour les affamés. 40 millions de dollars - approximativement un tiers de l’argent dégagé pour créer ce mécanisme international de soutien à l’occupation - vont passer directement à l’Israël de l’apartheid pour payer les factures de ses sociétés de combustibles et d’autres services basiques. Tout cela pendant que l’occupant continue de voler quelque 75 millions de dollars, tous les mois, en revenus fiscaux, plus les dépenses que cette somme permettait de couvrir précédemment.

Tandis qu’Israël nous domine militairement, nous confine derrière des murs et construit nos ghettos, les organismes internationaux, puissants, prennent à leur charge les coûts administratifs et financiers de l’occupation, recherchant le minimum vital pour le peuple emprisonné dans les bantoustans. Toute lueur d’espoir, même faible, pour que les Nations unies, l’Union européenne, la Cour internationale de Justice ou le « Monde libre » se mettent à faire respecter les droits des Palestiniens, apparaît aujourd’hui plus éloignée que jamais. L’Amérique latine négocie des accords de libre-échange avec l’occupant et les pays d’Asie s’ouvrent à la normalisation avec l’Israël de l’apartheid, alors que notre peuple se fait massacrer dans les rues.

Nos espoirs dans ces conditions n’existent que dans les peuples eux-mêmes, pour accélérer le boycott, le désinvestissement et les sanctions (BDS) pour isoler l’Israël de l’apartheid et le punir des crimes de guerre qu’il perpétue contre nous. Dans ceux qui nous soutiennent, parmi des millions de personnes qui luttent pour la justice dans le monde, et que nous voyons impulser les actions de solidarité et rendre au droit international quelque dignité.

Nous insistons pour la mis en application de la décision de la CIJ, nous insistons pour que les signataires de la Convention de Genève respectent tous leurs engagements, nous appelons à des mesures immédiates pour que toutes les résolutions de l’ONU soient appliquées, pour que l’occupation cesse et que les réfugiés reviennent chez eux. La Banque mondiale, les Etats-Unis et l’occupant lui-même peuvent être puissants, ils trouveront toujours, dans le peuple palestinien, un sujet insoumis qui reste attaché de façon immuable à ses grands idéaux de liberté, de justice et de libération.

Jamal Juma est le coordinateur de la Campagne populaire palestinienne contre le mur d’apartheid.

The Electronic Intifada - 8 juillet 2006
http://electronicintifada.net/v2/ar...
Traduction : JPP


Les articles publiés ne reflètent pas obligatoirement les opinions du groupe de publication, qui dénie toute responsabilité dans leurs contenus, lesquels n'engagent que leurs auteurs ou leurs traducteurs. Nous sommes attentifs à toute proposition d'ajouts ou de corrections.
Le contenu de ce site peut être librement diffusé aux seules conditions suivantes, impératives : mentionner clairement l'origine des articles, le nom du site www.info-palestine.net, ainsi que celui des traducteurs.