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Egypte : un Etat dépouillé par le clan Moubarak, sa police et son armée

mardi 15 février 2011 - 09h:55

Salwa Ismail - The Guardian

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Seul un millier de familles comptent dans un pays que Moubarak et ses acolytes ont considéré (et considèrent toujours ?) comme leur fief.

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De fait, et depuis des décennies, c’est l’armée qui exerce le pouvoir en Egypte. Comme le clan Mubarak et la clique qui l’entoure, les généraux on pillé l’Etat pour leur seul profit ...

Il y a beaucoup plus à chercher derrière Hosni Moubarak et ses hommes de main envoyés contre les manifestations pacifiques au Caire de la place Tahrir, que des questions de pure politique. Il est aussi question d’argent. Moubarak et la clique qui l’entourent ont longtemps considéré l’Egypte comme leur fief et ses ressources comme un butin à partager.

Grâce aux dévastatrices politiques de privatisation, ils se sont approprié des entreprises publiques rentables et de vastes étendues de terres appartenant à l’État. Un petit groupe d’hommes d’affaires a saisi des biens publics et acquis des positions de monopole sur des marchés de produits stratégiques tels que le fer et l’acier, le ciment et le bois.

Alors que le capitalisme de copinage prospérait, les industries locales qui étaient autrefois l’épine dorsale de l’économie ont périclité. Dans le même temps, les industries du secteur privé de fabrication de produits dangereux pour l’environnement comme la céramique, le marbre et les engrais ont augmenté sans être accompagnées d’une réglementation efficace, engendrant un coût très élevé pour la santé de la population.

Une toute petite élite économique maîtrise les secteurs de la production et de la consommation ainsi que les importations visant a accumuler de grandes richesses. Cette élite comprend des représentants de compagnies étrangères disposant de droits exclusifs d’importation dans l’électronique, les câbles électriques et les automobiles. Elle comprend également les promoteurs immobiliers qui ont créé un boom de la construction dans des zones réservées et des stations de vacances pour les super-riches. Une grande partie de ce développement est fait sur des terres publiques acquises à des prix très bas, sans appel d’offres ou mises en concurrence.

On estime qu’environ un millier de familles gardent le contrôle de vastes secteurs de l’économie. Cette classe affairiste a cherché à se consolider et à protéger sa richesse par le pouvoir politique. Le Parti National Démocratique a été leur principal véhicule pour ce faire. Cette alliance de l’argent et de la politique est devenue flagrante ces dernières années après qu’un certain nombre d’hommes d’affaires soient devenus ministres du gouvernement dont les portefeuilles étaient clairement à double emploi avec leurs intérêts privés.

Moubarak a présidé un processus dans lequel la richesse nationale est tombée dans quelques mains privées alors que la majorité de la population se retrouvait appauvrie - 40% du peuple égyptien vivant en dessous du seuil de pauvreté qui est de 2 dollars par jour - que le chômage augmentait, et que les possibilités d’emploi pour les jeunes se bloquaient.

Dans les derniers mois de 2010, les Egyptiens ont manifesté pour un salaire minimum mensuel à au moins 240 dollars, mais le gouvernement Nazif aujourd’hui démissionné, a alors décrété que moins de 100 dollars était suffisant comme revenu de base. Ce, à un moment où les prix des denrées alimentaires de base et les tarifs des services publics avaient augmenté à des taux très élevés. En effet, comme un économiste local l’avait expliqué, chaque produit et chaque service avaient terriblement augmenté sous le gouvernement Nazif - gouvernement qui a mis fin à l’impôt progressif et l’a remplacé par un impôt unique.

De plus, les services sociaux publics ont subi une privatisation masquée, plaçant la santé et l’éducation au-delà de la portée de vastes tranches de la population. Beaucoup de familles pauvres ont été contraintes de renoncer à l’espoir d’une éducation scolaire pour les enfants et les ont envoyés faire de menus travaux pour contribuer au revenu du ménage.

Il y a peu d’investissements publics dans la plupart des services, ainsi que dans les infrastructures comme les routes, l’eau et d’assainissement. Dans les années 2000, l’Egypte a connu de nombreuses manifestations populaires à travers le pays pour exiger la construction de ponts au-dessus des routes rapides et l’accès à l’eau potable dans les villes et villages.

Les légitimes exigences populaires dans le domaine sociale et économique ont été réprimées et refusées, et le régime a utilisé la police pour contrôler la population. En vertu des lois d’urgence, la police a acquis des pouvoirs étendus et est largement engagée dans la surveillance et le contrôle de la population. Les tortures et les mauvais traitements dans les commissariats de police sont devenus routiniers. Les barrages de police et les contrôles ont longtemps fait partie de la réalité quotidienne des Egyptiens. Dans l’atmosphère de corruption généralisée, la police pratique l’extorsion de fonds et offre ses services à des intérêts privés.

L’Egypte a été gouvernée comme une propriété privée. La famille immédiate de Moubarak est impliquée dans les pratiques de copinage capitaliste en tant que partenaires de la plupart des hommes d’affaires qui ont bénéficié de la corruption du régime. Ces bénéficiaires ne veulent pas quitter leur palais, plages et stations balnéaires, ni se passer des activités lucratives et de cette richesse extrême. Ces sont des actifs fixes qui ne pouvaient être transférés à l’extérieur du pays - mais il faut noter que les élites dirigeantes ont siphonné beaucoup de capitaux pour les banques étrangères.

Néanmoins, l’Egypte est ce pays transformé en propriété privée qu’ils ne veulent pas abandonner - c’est pourquoi ils ont envoyé leurs voyous sur la place Tahrir pour terroriser la population. C’est une tactique que le Parti National Démocratique a utilisé à maintes reprises.

Lors des élections nationales pour l’Assemblée du Peuple et le Conseil consultatif, les mêmes voyous sont engagés pour intimider les électeurs et faire en sorte de truquer les résultats. Devant chaque protestation populaire, la police envoie ses criminels attaquer les manifestants en utilisant tous les moyens d’intimidation, y compris le harcèlement sexuel des femmes participantes. Ces Thugs sont devenus un bras de la police et ils ont été utilisés comme informateurs dans les quartiers populaires de la ville. Ils sont récompensés par des licences d’exploitation de kiosques ou pour exécuter un service de minibus.

D’une certaine façon, les pratiques du banditisme ont été adoptées depuis des décennies par le régime pour se maintenir en place et pour protéger les intérêts de l’élite dirigeante. Face à la possibilité de plus en plus réelle de perdre ses richesses illégalement acquises en même temps que de perdre le pouvoir, le régime et ses complices ont recours à des techniques et des pratiques qu’ils ont déjà utilisées en toute impunité pour réduire au silence toute opposition et toute résistance.

Mais l’ampleur de la mobilisation populaire et la volonté de lutter pour la dignité et la liberté, ont rendu toutes ces tactiques obsolètes.

6 février 2011 - The Guardian - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.guardian.co.uk/commentis...
Traduction : Naguib


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